Lait solidaire

Les difficultés du marché sont générales: elles touchent toute la Suisse et toutes les productions, du lait de fromagerie à celui d’industrie, du bio au conventionnel. Même modestes, les surplus déstabilisent le marché et mettent le prix payé aux producteurs sous pression. À la traditionnelle distinction entre laits A et B s’ajoute désormais le lait C, réintroduit après six ans d’absence pour désengorger le marché.

Sa production, bien que facultative, doit être déclarée, afin que chacun adapte ses choix à la réalité de son exploitation, en connaissance de cause. Les dilemmes seront nombreux entre des conditions hivernales propices à une forte production – fourrages en qualité et en quantité, naissances décalées liées à la langue bleue – et l’incitation économique à ne pas traire à perte. Il est essentiel que les fiches de paie mentionnent clairement les volumes de lait C produits. Cette transparence permettra d’ajuster les décisions et d’assurer une répartition équitable de l’effort à l’échelle du pays, qu’il s’agisse de producteurs livrant directement un transformateur ou un négociant indépendant.

Sans cela, les régions périphériques, déjà pénalisées par des coûts de collecte élevés, seront encore désavantagées, accélérant la concentration de la production sur le Plateau. À terme, il ne sera plus viable d’envoyer un camion ramasser le lait d’un seul producteur isolé.

La cohésion laitière est cruciale: elle conditionne le maintien d’une production décentralisée, d’une utilisation équilibrée du territoire et d’une répartition harmonieuse de l’intensité agricole dans tout le pays. Sans solidarité entre producteurs, c’est l’équilibre même de notre agriculture qui vacillera.