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Climat. Les rendements agricoles pourraient chuter de 11 à 24% d’ici 2100

Le changement climatique va réduire la capacité de la planète à se nourrir: même en cas d’adaptation des pratiques agricoles, les rendements caloriques mondiaux de six cultures majeures seront inférieurs de 11% à 24% d’ici 2100, selon une étude publiée mercredi 18 juin dans la revue Nature.

Le problème alimentaire mondial est cependant davantage lié à une mauvaise gestion des ressources existantes qu’à un manque de production.iStock

ATS

ATS

24 juin 2025 à 17:30, mis à jour à 17:33

Temps de lecture : 3 min

Chaque degré celsius supplémentaire de réchauffement global réduira la capacité mondiale à produire de la nourriture de 120 kcal par personne et par jour, soit 4,4% de la consommation journalière actuelle, estiment les auteurs, qui font démarrer leur période de référence au début des années 2000.

«Si le climat se réchauffe de 3°C, c’est comme si chaque personne sur Terre renonçait à son petit-déjeuner», explique Solomon Hsiang, professeur en sciences sociales environnementales à la Stanford Doerr School of Sustainability et coauteur principal de l’étude, cité dans un communiqué.

Cette vaste étude a été menée pendant huit ans dans 55 pays par des scientifiques issus d’une quinzaine d’universités, dans le cadre du Climate Impact Lab, consortium de recherche de l’université de Chicago.

Si de précédentes recherches avaient déjà documenté les pertes de rendement agricole liées au réchauffement climatique, les auteurs soulignent que c’est la première fois que sont analysés à la fois les effets du climat et ceux de l’adaptation des pratiques (sélection variétale, utilisation d’engrais, irrigation… ).

Les auteurs ont analysé la situation pour six cultures de base: blé, maïs, riz, soja, sorgho et manioc, selon différents scénarios d’émissions.

Pratiques existantes

L’étude ne tient toutefois pas compte d’un changement de culture ou du décalage des semis. Elle se base sur les pratiques existantes, alors que les agriculteurs constatent déjà dans leurs champs les effets d’un réchauffement de plus de 1,5°C par rapport à l’ère préindustrielle.

Si les émissions de gaz à effet de serre continuent d’augmenter, les rendements en calories seront «inférieurs de 24%» en 2100 par rapport à un monde sans changement climatique. En revanche, les pertes de rendements seront limitées à 11% si les émissions chutent rapidement jusqu’à atteindre le net zéro.

L’importance du réchauffement redessinera le visage de la planète agricole: les grandes plaines américaines de la Corn Belt ou du Midwest verraient leurs rendements fortement chuter. Les pertes pourraient atteindre jusqu’à 41% en 2100 dans les régions les plus riches, aujourd’hui les plus productives.

Les communautés rurales pratiquant des cultures vivrières, notamment celles dépendant du manioc en Afrique, seraient aussi durement touchées (-28% de rendements dans les régions les plus pauvres).

Problème du gaspillage

L’emphase mise sur la baisse des rendements agricoles élude une autre réalité. La production alimentaire mondiale est aujourd’hui largement suffisante pour répondre aux besoins actuels en nourriture, mais environ un tiers de celle-ci (1,3 à 2,5 milliards de tonnes selon les estimations) est perdu ou gaspillé.

Les pertes dans les pays en développement sont principalement dues à des problèmes de distribution (infrastructures inadéquates), tandis que dans les pays développés, le gaspillage domine au niveau des ménages (environ 60% du gaspillage mondial, soit environ 74 kg par habitant) et des distributeurs (13% du gaspillage mondial, soit environ 290 millions de tonnes). C’est ce que révèlent les données de l’Unep et de Statista, par exemple.

Le problème alimentaire mondial est donc davantage lié à une mauvaise gestion des ressources existantes qu’à un manque de production. Des solutions comme l’amélioration des infrastructures, la sensibilisation des consommateurs, et des politiques anti-gaspillage peuvent réduire ces pertes sans augmenter la production agricole.