Héloïse Candolfi Directrice d'AgriGenève candolfi@agrigeneve.ch
Aujourd’hui à 00:00
Les discussions récentes autour d’un accord agricole avec l’administration Trump remettent en lumière une question fondamentale: jusqu’où sommes-nous prêts à aller dans l’ouverture de nos marchés alimentaires? Et surtout: à quel prix pour notre agriculture et nos standards?
Un exemple tout récent illustre bien ce glissement silencieux. Le poulet IP-Suisse peut désormais être nourri avec des aliments importés, produits hors de nos normes environnementales et sociales. L’étiquette reste suisse, mais une partie du contenu ne l’est plus vraiment. Ce n’est pas anodin: c’est le signe d’un système qui commence à s’ajuster par le bas pour rester compétitif face à des importations produites selon des règles totalement différentes.
Or nous savons ce que cela signifie. Les États-Unis contestent depuis longtemps nos exigences: interdiction des hormones, refus du poulet traité au chlore, normes strictes de bien-être animal, traçabilité complète… Pour eux, tout cela est un «obstacle au commerce». Pour nous, ce sont des garanties. Des choix de société. Des valeurs.
Quand nous importons de la viande, nous n’importons pas seulement un produit. Nous importons un modèle agricole. Et ce modèle n’a rien à voir avec le nôtre.
Nos éleveuses et éleveurs respectent des normes parmi les plus strictes au monde, avec des coûts de production élevés, un suivi sanitaire rigoureux et une transparence exemplaire. Ils ne peuvent pas – et ne doivent pas – être mis en concurrence avec des systèmes qui utilisent des hormones de croissance, des traitements chimiques des carcasses et des méthodes d’élevage incompatibles avec nos exigences.
Si la Suisse veut continuer à garantir une alimentation de qualité, traçable, durable et cohérente avec ce qu’elle attend de ses producteurs, elle ne peut pas sacrifier ses standards sur l’autel des intérêts commerciaux. Ouvrir nos frontières n’a de sens que si les règles du jeu sont équitables.
Défendre notre agriculture, ce n’est pas refuser les échanges internationaux. C’est rappeler que la souveraineté alimentaire, ça se protège et ça se respecte.





