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Les pertes des divers engrais azotés pourraient faire l’objet d’une étude


La Commission romande des fumures souhaite qu’Agroscope détermine les pertes potentielles par lessivage et volatilisation des divers engrais commercialisés en Suisse.

Une part importante de l’azote apporté par les engrais commerciaux n’est pas absorbé par les plantes. En effet, l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) estime que sur les 78 millions de tonnes d’azote épandus annuellement sous forme d’engrais commerciaux, 11,2 millions de tonnes se sont volatilisés et 15 à 20 millions de tonnes sont lessivés. Cela représente une perte totale d’environ 40%.

En ce qui concerne le lessivage, tous les fertilisants ne se valent pas. Le nitrate d’ammoniaque (ou plus précisément le nitrate d’ammonium) est l’engrais azoté le plus utilisé en Suisse. «Il contient de l’azote sous formes de nitrate (NO3-) et d’ammonium (NH4+). Cette dernière forme est retenue par le complexe argilo-humique du sol», précise Antoine Besson, chargé d’enseignement à la Haute école du paysage, d’ingénierie et d’architecture de Genève (Hepia) à Lullier. «Mais l’ammonium se transforme rapidement, en fonction de la température et de l’humidité, en nitrate, qui est soluble et sensible à la lixiviation (ndlr.: terme exact pour définir le lessivage).»

L’enseignant précise: «La quantité lessivée dépend de la quantité et de la forme de l’azote apporté, des précipitations qui suivent l’apport, mais aussi du type de sol et du stade de développement de la culture. Pour l’azote, la règle est: pas d’apport unique trop important (60 kg N/ha au maximum), un bon fractionnement et un bon timing. On peut alors espérer que 70% de la quantité apportée soient effectivement prélevés par la culture».

Les firmes ont développé des moyens de fixer l’azote pour limiter les pertes. Certains engrais dits «retards» ou «à libération progressive» contiennent par exemple un inhibiteur de nitrification ou une matrice organo-calcique qui protège les éléments fertilisants.
 

Aurélien Roger,
secrétaire de la CRF.
Manque d’informations objectives
Force est de constater qu’à l’heure actuelle, les agriculteurs suisses manquent d’informations neutres sur les différents engrais commercialisés ainsi que sur leur efficacité d’utilisation. Consciente de ce problème, la Commission romande des fumures (CRF) se lance dans deux projets distincts mais complémentaires. Cette association à but non lucratif est composée d’agriculteurs, de conseillers en production végétale, d’enseignants dans les écoles d’agriculture et d’agronomie et de distributeurs d’engrais en Suisse romande. Son secrétaire, Aurélien Roger, précise les deux projets validés le 12 mai dernier par l’assemblée générale de l’association réunie à Morges (VD): «Le premier vise à refaire une liste des engrais, actualisée et indépendante. Cette liste contiendra toutes les informations techniques et légales utiles aux exploitants. Le second, plus complexe, a pour but de qualifier les engrais azotés d’un point de vue écoresponsable et de manière neutre et scientifique».

En ce qui concerne la liste, Aurélien Roger précise que le travail débutera dès qu’Agroscope aura publié les Principes de la fertilisation des cultures agricoles en Suisse (PRIF). Ces derniers sont censés remplacer dès cette année les Données de base pour la fumure (DBF), dont les dernières datent déjà de 2009. La CRF envisage de ne publier cette liste que sous forme digitale, facile à réactualiser.

Pas encore de protocole ni de financement
Le second projet en est également à ses balbutiements. «Agroscope a confirmé que la tenue d’essais en vue de définir l’efficience des divers engrais azotés entrait dans leur cahier des charges. Nous devons nous rencontrer prochainement et définir ensemble un protocole pour cette étude», indique Aurélien Roger. La recherche devra notamment déterminer les pertes potentielles par lessivage et par volatilisation et calculer un coefficient réel d’utilisation (CRU) pour les fertilisants commercialisés. Ces essais devraient se faire en laboratoire, en pots de culture et peut-être même en plein champ.

«Pour être conclusives, les expérimentations devront être nombreuses, en plein champ, et s’inscrire sur le long terme», précise Antoine Besson, qui est également membre du comité directeur de la CRF. Le chargé d’enseignement à l’Hepia souhaiterait aussi vérifier si le surcoût engendré par l’achat d’engrais «retards» est compensé par une meilleure efficience.

Reste à assurer le financement de cette recherche. Aurélien Roger se veut optimiste: «Quand le protocole sera établi, Agroscope nous fournira une estimation des coûts. Nous prendrons alors contact avec les firmes qui distribuent ces engrais. La plupart d’entre elles sont membres de la CRF et ont réagi favorablement à la proposition du comité directeur».

Expériences positives d’agriculteurs
Certains agriculteurs emploient déjà des engrais «retards». Olivier Waber, exploitant à Pompaples (VD), en utilise depuis une douzaine d’années: «En théorie, on peut appliquer tout l’azote en une fois, mais pour ma part, j’effectue deux apports azotés. Depuis que j’utilise ces fertilisants-là, je n’ai quasi plus eu de problèmes de verse, même avec 80% de mes céréales inscrites en extenso». A défaut de données neutres et vérifiées dans les conditions de production suisses, le dynamique agriculteur se réfère à la pres­se spécialisée française et mè­ne ses propres essais. «En 2007, nous avons semé du blé en bandes sur une même parcelle. Avec un engrais «retard», j’ai obtenu 8 quintaux de plus par hectare et le poids à l’hectolitre était lui aussi meilleur.»

L’agriculteur de Pompaples a diminué ses apports d’azote de quelque 10%. «Un autre avantage est que cet engrais ne brûle pas les cultures, c’est surtout intéressant dans le maïs», ajoute-t-il.

Guy Humbert, agriculteur à Marchissy (VD), s’est également mis aux engrais «retard» l’an passé. Cette année, il a lui aussi mené ses propres essais: «Sur du colza, j’ai divisé une parcelle en deux. Il y a eu très peu de différence de rendements entre la partie qui a reçu une fumure standard et celle sur laquelle j’ai apporté un engrais «retard». Mais j’ai économisé deux passages, ce qui a compensé le surcoût. J’ai aussi fait un essai avec du blé, mais sur deux parcelles distinctes, avec des précédents culturaux différents et donc difficilement comparables. Les résultats sont prometteurs: j’ai obtenu 10 quintaux de plus à l’hectare».
Vincent Gremaud, 16 septembre 2016


 

 

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