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Un nouveau diplôme romand destiné aux férus de petites surfaces agricoles


Agrilogie propose une nouvelle formation de praticiens et de praticiennes en microfermes. Objectifs: conduire et gérer durablement sa structure.


ag8_Formation microfermes


Malgré l’engouement pour les microfermes, rares sont les formations proposées entourant ces méthodes en Suisse romande. Pour pallier ce manque, Agrilogie, centre de formation agricole du Canton de Vaud, va lancer des cours dans ce domaine avec, à la clé, un diplôme dispensé par l’Association des groupements et organisations romands de l’agriculture (Agora). La formation, qui s’effectue sur une année, se déroulera 21 fois sur deux jours en fin de semaine. Pour les 16 inscrits et inscrites, la rentrée des classes est prévue le 31 mars 2023.

Des compétences clés
Les cours seront départagés entre le site de Marcelin et de fréquentes visites au sein de microstructures. L’objectif consiste à faire découvrir la réalité du terrain. Des excursions sont prévues auprès d’exploitations axées généralement sur la production maraîchère, plus adaptée à ce genre de modèle, à l’exemple de l’association A la Belle Courgette, à Bussigny (VD), ou de la coopérative La Clef des Champs, à Courgenay (JU). Néanmoins, des passages au sein d’exploitations qui comprennent de l’élevage, comme à la ferme biologique de La Touvière, à Meinier (GE), sont également à l’agenda.

Les thèmes abordés doivent permettre l’acquisition de compétences spécifiques à la bonne conduite d’une microferme rentable et viable. La formation s’oriente avant tout sur la production de légumes, mais introduit aussi des notions liées à l’arboriculture, aux petits élevages et à la transformation des produits. Bien que les cours soient dédiés aux aspects agronomiques – mécanisation, sol, fumure, irrigation –, la palette est étendue à des bases de droit, finances, gestion du personnel et communication. La commercialisation, la sécurité au travail, l’ergonomie ainsi que l’hygiène font également partie des cours proposés.

Les intervenants sont des spécialistes reconnus dans leur domaine, comme Jacques Fuchs, du FiBL, en matière de santé des sols et Claudia Schreiber, avocate et spécialiste du droit de l’aménagement du territoire.

Le cursus s’adresse aux personnes de plus de 28 ans qui ont déjà terminé une formation professionnelle. Ces exigences ont été mises en place afin d’éviter l’effet doublon par rapport au CFC de maraîcher existant. Mais elles peuvent faire l’objet d’exceptions, selon les profils. Un mois de stage préalable au sein d’une microferme ou d’une entreprise maraîchère est également requis. Un entretien professionnel d’une heure et un examen écrit viennent clore l’année. Il faut compter 2550 fr. pour suivre ce cursus, repas compris.

Une forte demande
David Bichsel, micromaraîcher et ingénieur en gestion de la nature à l’origine de la formation, constate: «Le but, ce n’est pas de remplacer le CFC. Cependant, nous avons pu observer une forte demande de la part d’apprentis et apprenties de l’Ecole d’agriculture du Valais qui se sont même fendus d’une lettre à la direction, il y a de cela quelques années, réclamant des cours de micromaraîchage».

Découvrant également l’enthousiasme pour les microfermes, le département Suisse romande du FiBL a mis sur pied un groupe d’intérêt sur le sujet en 2019, dirigé par Hélène Bougouin. Par la suite, en collaboration avec la centrale de vulgarisation agricole Agridea, quelques journées de cours ont été proposées autour des business models et du design relatifs à la permaculture.

Destinées aux professionnels, tels que les conseillers et les agriculteurs, ces journées ont attiré aussi quelques néophytes. «L’un de nos objectifs a été de favoriser le partage d’expériences», rapporte Hélène Bougouin. «Donner à voir les contraintes matérielles exigées par la mise en place et le suivi d’une microferme s’est imposé comme une nécessité afin de prévenir certaines déceptions.»

Le travail de master de David Bichsel, réalisé à la Haute école des sciences agronomiques, forestières et alimentaires (HAFL), a posé les jalons de la formation actuelle d’Agrilogie. Cette étude a d’abord été concrétisée au travers de cycles de cours dispensés en 2021 et 2022, et organisés avec Tal Shani, maraîcher et biologiste. Faute de places, certaines inscriptions ont dû être éconduites. A la suite de ce succès et d’entente avec David Bichsel et Tal Shani, Agrilogie a décidé d’inclure la formation en microfermes à son programme.

Malgré l’existence du label «Terre durable», qui certifie les microfermes de Suisse, la définition du concept n’est pas encore stabilisée. Hélène Bougouin souligne que ce sont les exploitations qui s’autodéfinissent en tant que telles. Si les caractéristiques varient, la plupart des structures s’identifient par «la recherche d’autonomie, des pratiques culturales alternatives et une attention particulière portée à la protection des ressources naturelles», selon les termes d’Hélène Bougouin.
Pauline Clerc, le 24 février 2023

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Justine Baudois
«Depuis que mon père a rénové une ferme dans le canton de Fribourg, l’idée de reprendre une formation agricole a germé dans mon esprit. Je me suis alors penchée sur les formations offertes par la Haute école des sciences agronomiques, forestières et alimentaires (HAFL). Pour entrer en bachelor, j’ai terminé une maturité réalisée à Marcelin (VD) et j’ai entamé une année de stage préparatoire. Malheureusement, des problèmes de santé m’ont empêchée de mener à bien ce projet. Pendant ma convalescence, j’ai réalisé un jardin sur le terrain de la ferme familiale avec mes parents qui m’ont donné l’envie de me perfectionner dans le domaine de la production végétale. Mon rêve serait de mettre à profit ces trois ou quatre hectares de terres agricoles pour des cultures maraîchères, un peu d’arboriculture et, pourquoi pas, y faire paître quelques ruminants. Mon père est déjà propriétaire d’une vache et de ses deux veaux. J’aimerais aussi pouvoir faire de ce lieu un endroit d’accueil et de transmission autour de thèmes liés à l’agriculture. Mon frère a des enfants et ce cadre se prête parfaitement à leur épanouissement. Je me réjouis de pouvoir consolider mes acquis au travers de la formation car, pour l’instant, mes connaissances sont très intuitives. J’espère aussi pouvoir acquérir des notions de gestion et d’économie car celles-ci me semblent primordiales pour faire tourner une microferme de manière pérenne. Engagée à 100%, je pense baisser mon taux pour suivre au mieux la formation.»
 

Alizé
de la Harpe
«Grâce à quelques amis, j’ai eu l’opportunité de connaître l’association A la Belle Courgette qui produit des paniers de légumes cultivés sans intrant chimique et avec un minimum d’énergie fossile, dans la région de Bussigny (VD). Je suis devenue membre de soutien, puis bénévole. Pendant le Covid-19, j’ai eu, subitement, beaucoup de temps libre. J’ai donc décidé de m’investir plus intensément pour l’association. J’ai réalisé à quel point j’aime les activités en plein air et vivre au fil des saisons. Le travail manuel propre à l’agriculture m’a également beaucoup séduite. Post-Covid, j’ai donc continué à me rendre aux champs, autant que mes activités annexes me le permettaient. J’ai intégré le comité et j’ai repris le rôle d’animatrice en accueillant les visites des classes. Après une formation en géosciences à l’Université de Lausanne (Unil), je suis actuellement employée à temps partiel à l’EPFL en tant que chargée de projet dans le domaine de la sobriété numérique. J’aimerais me réorienter dans le secteur primaire pour avoir un impact plus direct sur le système de production. Dans le futur, je voudrais trouver un emploi aligné sur mes valeurs, au travers duquel je puisse œuvrer plus concrètement à un changement positif quant à notre lien à l’environnement. Cette formation va me permettre d’acquérir des connaissances du maraîchage et d’élargir mon réseau. En effet, j’aimerais pouvoir y faire des rencontres afin de collaborer sur des projets et/ou en mettre en place.»
 

___________________________
INTERVIEW
 
Faire coexister les modèles



Christian Pidoux
Direct eur d’Agrilogie, 
Etat de Vaud



Est-ce que la mise en place de cette formation répond à des attentes sociétales nouvelles?
Cette formation n’est pas une réponse à une nouvelle forme d’agriculture qui serait apparue récemment. Ce qui est nouveau, c’est le terme de micromaraîchage. Mais le concept date du XIXe siècle, lorsque, avec l’industrialisation, les villes se sont agrandies nécessitant la production de légumes frais à leurs périphéries. Cette nouvelle demande a permis le développement, dans la ceinture des villes, de petites exploitations familiales. Restreintes en termes de surface, elles concentraient leurs activités sur des cultures maraîchères, diversifiées et intensives. A Lausanne par exemple, le marché du centre-ville a vu le jour selon cette logique. Aujourd’hui encore des paysans des environs, du Mont-sur-Lausanne (VD) ou de Romanel (VD), tiennent des bancs de marché. Par contre, les légumes que l’on trouve dans les grandes surfaces sont le plus souvent produits par de grandes entreprises maraîchères spécialisées ne se trouvant pas forcément à proximité des villes. Comme aujourd’hui une nouvelle demande existe pour des produits de proximité immédiate, notre formation vise à renforcer les compétences professionnelles de petites unités de maraîchage.

Qu’est-ce qui a motivé Agrilogie à mettre en place cette formation?
Nous voulons être l’école de toutes les agricultures et éviter les guerres de chapelle. La diversité est profitable à tous et plusieurs modèles peuvent coexister. Nous devons faire front commun face aux nombreux défis que rencontre le monde agricole. D’une part, nous voulons soutenir une production à grande échelle, plus spécialisée et installée à la campagne, qui couvre l’ensemble des besoins alimentaires de la population. D’autre part, nous voulons encourager les petites structures en périphérie des villes. Elles assurent un lien précieux avec ces dernières. Ce ne sont pas des entités antagonistes. Toutes deux peuvent répondre au principe de durabilité sur le plan économique, social et écologique. Nous ne pouvons pas faire l’impasse sur les réalités matérielles: les exploitations doivent être viables. C’est notamment ce que nous voulons transmettre. En bref, enlever les sandales, mettre les bottes, sortir la calculette et retrousser les manches.

Quel type de public est intéressé par la formation?
Sur les seize étudiants et étudiantes que nous allons accueillir prochainement, les profils sont assez diversifiés. On trouve des personnes plutôt urbaines qui ont déjà fait des études supérieures dans divers domaines et qui ont envie de revenir à la terre. Mais nous avons également pu rencontrer des personnes issues du monde agricole qui voudraient se tourner vers d’autres paradigmes, moins traditionnels. Les gens cherchent aussi des contacts pour entamer des collaborations, car souvent ils ne sont pas propriétaires. Dans le modèle des microfermes, des petites surfaces suffisent. La tranche d’âge concerne plutôt les plus de vingt-cinq ans.

Des conseils pour les jeunes qui voudraient lancer leur propre microferme?
Il faut bien connaître le cadre législatif. Un nombre important de réglementations peuvent entraver de tels projets. Nous proposons d’ailleurs des cours sur le sujet afin d’éviter les déceptions.
Propos recueillis par Pauline Clerc


 

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