L’agroforesterie offre de nombreux avantages dont la culture bénéficie.
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Expérimenter, tâtonner, trouver le meilleur équilibre entre cultures et arbres: malgré l’expérience importante déjà accumulée en France et en Europe, l’agroforesterie est un système qui se cherche encore en Suisse et dont la vulgarisation est en phase de démarrage. Voici la suite du premier volet consacré à ce sujet, publié le 20 juin dernier.
A quoi sert l’agroforesterie?
L’agroforesterie présente de nombreux avantages. Les arbres jouent un rôle de rétention et de régulation de l’eau. Leurs racines en décompactant le sol augmentent sa perméabilité. L’eau est ainsi absorbée plus rapidement et stockée en profondeur, permettant sa restitution à la culture si besoin. On peut parler d’effet éponge, amplifié par l’augmentation de la matière organique du sol grâce à la décomposition des feuilles et des racines fines annuelles. Grâce à un climat plus tempéré en surface, l’évaporation est moindre. Le système racinaire plus profond des arbres permet le lessivage des nitrates en récupérant les éléments nutritifs non utilisés par la culture. L’arbre a un effet d’ombrage et de brise-vent, ce qui limite l’évaporation et protège contre l’érosion éolienne.
L’arbre est un régulateur thermique. Il tempère les chaleurs d’été (céréales) et assure une protection contre les gelées de nuit (maraîchage par exemple).
Dans les systèmes arbres sur pâture, le bétail – ou la volaille – dispose d’abris. La bande enherbée offre un lieu de vie pour de multiples auxiliaires en leur assurant, si elle est bien gérée, un abri permanent pour tous les cycles de vie. Les arbres fournissent également du pollen et du nectar pour les abeilles. Outre les auxiliaires présents dans le sol, les arbres accueillent également les oiseaux tels que les rapaces.
Est-ce rentable comme production?
Les plants d’essence forestière ne sont pas cher au contraire du matériel pour leur protection. Il faudra intégrer le temps de travail pour la plantation et la taille ainsi que le suivi du moins durant les années de formation de l’arbre. Comme nous l’avons indiqué dans notre premier volet, Agroscope a estimé, selon deux scénarios, que l’agroforesterie serait plus avantageuse à long terme que la monoculture, car elle compenserait les pertes sur les grandes cultures en mauvaises années (Rapport ART 725). Quant à l’arbre, Agroscope relève que la valeur d’une culture de bois d’œuvre (bois de construction ou d’ébénisterie) peut être élevée et offrir de belles perspectives. Si l’on part dans des arbres fruitiers hautes tiges, il est nécessaire de prévoir si possible des contrats de prise en charge de la récolte ou de partir en vente directe. La noix est une opportunité, car elle fait son retour en Suisse. Enfin, en France, l’arbre têtard pour le bois énergie est très rentable.
Les racines des arbres ne gênent-elles pas la culture?
Non, à condition que l’on «pousse» l’arbre à développer ses racines en profondeur. Le passage de la charrue ou d’une sous-soleuse le long de la rangée pour arracher les racines superficielles des arbres durant quelques années et/ou la présence d’une culture d’automne concurrente à l’arbre feront l’affaire. La culture s’épanouira au-dessus. Mais répétons-le: il faut des sols suffisamment profonds et de qualité.
Quelles essences choisir?
Noyers, merisiers, sorbiers, alisiers, cormiers, chênes, tilleuls, érables, pommiers poiriers, etc., le choix de l’essence dépendra des sols, du climat, des objectifs définis (bois d’œuvre, bois énergie, fruits) et de la convivialité avec la culture. Si l’on souhaite recevoir des contributions, il s’agira de consulter la liste des essences y donnant droit et les conditions.
Quels sont les soutiens?
Il n’y a pas encore de soutien pour l’agroforesterie en temps que système de production. Les arbres sont imputables comme surface de promotion de la biodiversité (SPB). Cela concerne les essences fruitières haute tige ou les arbres isolés (un arbre correspond à 0,5 are de SPB) à condition que la bande sous la rangée ne soit pas coupée.
Les contributions pour les surfaces de promotion de la biodiversité donnent droit à
15 francs par arbre pour les noyers et arbres fruitiers hautes tiges en qualité I, 30 francs en qualité II cumulables (15 pour les noyers) plus 5 francs si l’on s’intègre dans un réseau. On consultera la liste des essences retenues pour les toucher ainsi que les conditions d’octroi (consulter la brochure Agridea Promotion de la biodiversité dans l’exploitation agricole, téléchargeable sur agridea.ch). Quel que soit le mode d’entretien de la bande, il est possible de s’intégrer à un projet de qualité du paysage. Certains agroforestiers renoncent à ces soutiens en raison des contraintes y liées et de l’évolution incertaine peu compatible avec un projet à long terme.
Pierre-André Cordonier, 27 juin 2014